La revanche
(Pierre Lary, 1981)

On cherche encore l'intérêt de ce film poussif, mal écrit et sans imagination. Ce n'est pas tant le côté féministe à deux sous qui irrite mais bien la nullité abyssale du scénario et son récit invertébré. Résultat : un insondable ennui au bout de dix minutes. Bien sûr, il y a de bons comédiens (mention spéciale à Philippe Avron dont le rôle fantaisiste est peut-être la seule chose qu'on peut sauver) mais ils ne semblent pas spécialement concernés.


Ma femme
(Tinto Brass, Luigi Comencini & Mauro Bolognini, 1964)

Film à sketchs sur les déboires du couple, c'est évidemment d'une délicieuse cruauté et, globalement, de bonne facture. On retiendra principalement l'unique contribution de Comencini, le plus long segment du film, cynique à souhait, dans lequel Sordi, médiocre architecte cherchant à obtenir les faveurs du maire pour un projet immobilier, se sert d'une prostituée (formidable Mangano) pour arriver à ses fins. C'est brillant bien que ce soit le seul sketch à ne pas être écrit par Sonego. Brass et Bolognini amènent chacun une dose d'absurde et de pathétique. Equilibré, ce qui n'est pas toujours le cas dans ce genre d'exercice.


L'embuscade
(Zivojin Pavlovic, 1969)

Le film qui a valu à Pavlovic sa mise au ban du cinéma yougoslave et, dans le même temps, sa renommée internationale. Sur le fond, c'est une dénonciation parfaite du mensonge communiste et des illusions nées à la fin de la Seconde guerre mondiale: les caciques (et plus encore les petits chefs) ne sont finalement pas plus différents de leurs prédécesseurs, ne reculant devant aucune manipulation pour arriver à leurs fins. La forme est en revanche moins efficace et la réalisation, si elle est secondée par une très belle photographie, pêche un peu par son statisme. 


L'incroyable homme invisible
(Edgar G. Ulmer, 1960)

On aurait envie de balayer ce film modeste d'un revers de main. Et pourtant, on aurait tort. Bien entendu, il n'y a rien de génial ici, le manque de moyens est partout évident ; mais Ulmer donne corps à son récit avec une telle honnêteté, un tel sens de l'économie qu'il y a pourtant lieu d'en faire une sorte d'idéal de série Z (sans connotation péjorative). D'autant que ce polar fantastique donne un bon aperçu de ce qu'étaient la paranoïa atomique et les dérives du complexe militaro-industriel (la conclusion).



Le médaillon du crime
(Juan Bustillo Oro, 1956)

Il y a dans ce film, dans sa partie introductive du moins, quelque chose qui évoque Dassin et cette manière sociologique qu'il avait de préciser les contours de ses polars. Mexico remplace New York ou Los Angeles et le hasard des situations fait le reste. En opposant le petit employé ingénu au gangster sans scrupule, Le médaillon du crime ne brille pas par sa singularité. Cependant, la narration est fluide et la mise en scène, sans être un modèle de sécheresse, convainc par son efficacité. C'est vraiment pas mal.


Fin de saison
(Robert Siodmak, 1933)

Adaptant Stefan Zweig, le cinéaste fait sienne la finesse et l'élégance de l'écrivain. Le film touche par sa justesse de ton et émeut davantage lorsqu'il s'attache à évoquer l'amitié entre le jeune garçon et Von Haller que l'histoire d'amour impossible qui lie la mère et ce dernier. Il est dommage en revanche qu'en dépit de quelques séquences réussies Fin de saison se révèle si statique. Il manque la fluidité et l'inventivité qui président à quelques-uns des meilleurs films de Siodmak dans les années 30.


Abus de pouvoir
(Camillo Bazzoni, 1972)

Polar italien nerveux qui emprunte quelques motifs au giallo, le film rend compte avec pertinence (à défaut d'audace) du climat politique et de la corruption dans l'Italie de l'époque. Malheureusement, s'il lorgne vers des références louables (Rosi, Damiani ou Melville sont convoqués), Abus de pouvoir n'est pas des plus aboutis. La faute à un manque évident de personnalité derrière la caméra qui rend difficile l'exécution d'un scénario certes engagé mais cousu de fil blanc. Et la bande originale d'Ortolani n'est pas inoubliable.


L'homme de la Tour Eiffel
(Burgess Meredith, 1949)

Le parti-pris de faire explicitement de Paris un personnage n'apporte strictement rien au film, d'autant que notre chère capitale est vidée de toute vie et est présentée dans un Technicolor lavasse assez immonde. Quant à l'exécution, elle est perpétuellement bancale, n'effleurant jamais vraiment la sécheresse tragique du roman de Simenon « La tête d'un homme ». Charles Laughton surprend plus qu'il ne convainc dans le rôle de Maigret ; seul Franchot Tone sort son épingle du jeu parmi une distribution bien faible. Très décevant.


Tokijiro, le loup solitaire
(Tai Kato, 1966)

L'excellent Kato nous livre une belle variation sur le thème de la rédemption dans laquelle le héros, un samouraï sans attache, protège une femme et son enfant après avoir tué le mari/père. La mise en scène est virtuose et la gestion de l'espace proprement stupéfiante (les dix dernières minutes sont à ce titre exemplaires). Et si le film ne lésine pas sur les geysers de sang, c'est aussi et avant tout une œuvre intimiste où les dilemmes moraux des deux personnages principaux sont traités avec une pudeur remarquable.


Un homme à genoux
(Damiano Damiani, 1979)

Si le scénario s'articule avec quelques artifices narratifs quelque peu faciles, le propos n'en est pas moins percutant. Fidèle à sa marque de fabrique, Damiani interroge l'omniprésence de la mafia dans le quotidien italien (ici en Sicile) à tous les niveaux de la société. La mise en scène retranscrit parfaitement ce sentiment d'étouffement. Côté interprétation, Guiliano Gemma confirme qu'il n'est pas extraordinaire, mais il faut souligner la prestation de Michele Placido qui lui vole la vedette. Les dernières minutes sont d'une grande densité émotionnelle. Bon film.


La guerre des mondes : le siècle prochain
(Piotr Szulkin, 1981)

La référence explicite à H.G. Wells et Orson Welles en introduction ne trompe personne : Piotr Szulkin utilise ces figures tutélaires pour critiquer très innocemment le régime polonais en place. Mais au-delà de l'aspect politique, c'est avant tout un film fantastique qui, bien que refusant tout spectaculaire, décortique les mécanismes d'une colonisation progressive des esprits à grands renforts de médias. Le soin apporté aux décors est à souligner, tout comme la galerie des personnages, tous plus grotesques les uns que les autres, faisant du cauchemar une farce.


Portrait d'un criminel
(Hideo Gosha, 1985)

L'ambition narrative est partiellement réalisée. Gosha a mis plusieurs années à concrétiser cette fresque (car s'en est une) suivant le parcours d'un criminel qui, désireux de posséder librement le corps de sa maîtresse, tue femme et enfant avant de connaître un long et douloureux repentir. C'est un portrait ambitieux, complexe et, il faut bien l'avouer, ambigu. Formellement, le film est beau et abouti mais le recours aux multiples flashbacks nuit à la lisibilité de l'ensemble. En filigrane, la société japonaise d'après-guerre y est montrée sous son jour le plus conservateur.


Un moment d'égarement
(Claude Berri, 1977)

Jolie et touchante étude du couple, de la paternité et de l'amitié. La modestie et la pudeur de la mise en scène n'empêche pas une certaine acuité dans cette France des années 70 prompte, croit-on, à la libération des mœurs. Jean-Pierre Marielle et Victor Lanoux sont évidemment épatants et campent des personnages très bien ciselés. L'un des bons films de Claude Berri.


La fille du fleuve
(Mario Soldati, 1954)

Mélodrame inégal dans lequel surnage évidemment la beauté de Sophia Loren. Les personnages sont stéréotypés: la belle sauvage insensible au charme du voyou, le flic qui s'éprend de l'héroïne et jalouse son ennemi secret. La partie de cache-cache annonciatrice du drame et la séquence finale sont en revanche deux moments superbes. Les auteurs (Soldati mais aussi Bassani, Vancini et Pasolini, d'après Moravia) ont su y insuffler une vraie densité émotionnelle.


Une femme dont on parle
(Kenji Mizoguchi, 1954)

Encore un beau film du maître qui repose sur l'équilibre parfait entre une mise en scène discrète mais toujours appliquée et une narration particulièrement tenue. En moins de 90 minutes, cinéaste et scénaristes parviennent à vitaliser leur intrigue principale grâce à une succession de portraits (le jeune médecin, la geisha atteinte d'un cancer, les clients plus ou moins violents ou folkloriques...) et de sous-intrigues jamais hors-sujet. Cet ensemble donne corps à une émouvante histoire de rapports mère-fille sur fond au sein d'une maison de geishas. Avec l'évidence des réussites et sans caricature.